Introduction
Arpenter la montagne. Gravir un col, s’arrêter. Descendre. Traverser le lac à la nage. Au loin, une lumière joue avec un sommet. Vite, déclencher. Ici, un brin de serpolet à coincer entre ses dents. Poursuivre sur le chemin, suivre les traits jaunes peints sur les rochers, chercher le prochain cairn, trouver un nouveau panneau directionnel jaune. L’herbe grasse pique les chevilles. Une marmotte siffle au loin. Dans un méandre du torrent, un groupe de jeunes éphèbes se baigne. Déclencher. Surmonter le vertige pour arriver au sommet, relier d’un même coup d’oeil deux vallées que l’on ne connaissait que séparément.
Je rentre en ville, la tête remplie d’images, de sensations. Et avec plein de photos, de relevés divers à exploiter à mon retour.
Après mon diplôme de fin d’études aux beaux arts, je tâche de poursuivre ce que j’y ai entamé. Écrire de nouveaux « fragments ». Chercher des résidences. Me structurer juridiquement. Performer devant un public de temps à autre. Écrire encore. Résister. Puis souffler quelques jours. Dans les Pyrénées. Et renouveler mon séjour, à chaque fois que je me sens m’étioler. Mettre entre parenthèses ma vie sociale, professionnelle et amoureuse le temps de me recentrer. Mon équilibre est un balancier. Sprint, silence, rush, repos. Subrepticement, la montagne a fini par percoler dans ma pratique. Je songe de moins en moins à écrire mes fragments amoureux et performances qu’à restituer mes impressions montagnardes pour les retransmettre.Je rassemble des essais divers, de matières, de couleurs, des sons, des images en mouvement. J’additionne, je soustrais des éléments, je teste. Je passe de l’image au volume, et inversement. Puis apparaît une collection qui prend en ampleur.